Les pénuries de médicaments peuvent être à l’origine d‘erreurs médicamenteuses parfois lourdes de conséquences. Les 31 centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) ont pu l’observer avec certaines spécialités.
Les cas les plus dramatiques rapportés sont survenus en cancérologie, lors du remplacement de la spécialité Belustine (lomustine) en rupture de stock, par la spécialité Cecenu importée d'Allemagne. Suite à ce changement, deux cas graves ont été rapportés, dont l’un a conduit au décès du patient. À l’origine, il s'agit d'une erreur de posologie : « Belustine est conditionnée en boîte de 5 gélules de 40 mg, alors que Cecenu est présenté en boîtes de 20 gélules de 40 mg. Cette différence, dont les pharmaciens hospitaliers ont été informés en février 2019, a conduit, à deux reprises au moins, à un surdosage chez des patients qui ont pris en une seule fois, comme ils le faisaient avec la Belustine, la totalité des gélules contenues dans la boîte de Cecenu… soit 800 mg au lieu de 200 mg », explique le CRPV du Nord-Pas-de-Calais. Dans les deux cas, une pancytopénie (baisse morbide du nombre de globules rouges, de globules blancs et des plaquettes), dont une compliquée d’une toxidermie bulleuse grave à la suite de la prise en charge par antibiotiques, est survenue.
Après cet exemple dramatique, les CRPV ont remonté d’autres cas de pharmacovigilance liés à des indisponibilités de médicaments. Un patient, lors de la rupture de stock de Mysoline, s’est ainsi trouvé en manque de traitement et a fait une crise d’épilepsie. Ou encore, lorsqu’un pharmacien a substitué du Solupred prescrit par du Célestène pour une laryngite chez un jeune enfant, il s’est trompé dans le calcul des doses et l’enfant a été hospitalisé pour infection sévère à la suite de ce surdosage en corticoïde. Autre illustration récente déclarée par un pharmacien d’officine : « un patient sous Spiriva gélule, qui manquait, a dû changer de traitement. Il a alors été traité par Respimat en inhalation, mais il a fait une allergie cutanée », rapporte Sophie Gautier, représentante du réseau français des CRPV.
« Si ces exemples ne sont pas exhaustifs, ils justifient, entre autres, la préoccupation de l’État autour du problème des ruptures de stock », poursuit le CRPV du Nord-Pas-de-Calais. En septembre 2019, le gouvernement a ainsi mis en place des mesures qui visent les industriels (obligation de constituer un stock de sécurité de 2 à 4 mois sur les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, obligation d’approvisionnement de solutions alternatives en cas de pénurie, sanctions financières…)
Tout effet indésirable doit être déclaré
Pour avoir une vision plus exacte de ce phénomène et mettre en place les moyens d’y remédier, les CRPV ont lancé une étude qui recense tous les incidents et accidents en relation avec les pénuries de médicaments. Baptisée CIRUPT (conséquence iatrogène d'une rupture de stock), elle se déroulera de janvier à décembre 2020. Elle consiste à coder spécifiquement les déclarations d’erreurs médicamenteuses liées à une rupture ou à une indisponibilité d’un médicament.
Pour remplir à bien cette mission, Sophie Gauthier invite les officinaux à déclarer plus systématiquement les effets désirables dont ils sont témoin. « En effet, ce sont souvent les effets les plus graves, avec hospitalisation, qui nous sont rapportés. Pourtant, tout effet indésirable, même peu important, est à prendre en compte, car il a des répercussions pour le patient. » Et le pharmacien d’officine est le mieux placé pour récolter ce type d’information.
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