« QUAND nous sommes arrivés ici, je n'aurais pas imaginé que nous resterions 28 ans », indique Alain Bruys. En effet, quand il ouvre en 1981, avec son épouse pharmacienne, la première officine de Lacapelle-Biron, il ne connaît guère le Lot-et-Garonne. Né en région parisienne, il s'installe dans ce minuscule village de 450 habitants, loin des grands axes de circulation. Il en tombera amoureux au point d'y faire carrière et d'y envisager sa retraite.
Une carrière orientée par sa passion de la botanique. Après avoir échoué au concours de l'école vétérinaire, Alain Bruys s'inscrit en fac de Sciences, où il croise la route d'éminents professeurs lui communiquent leur passion : « Pendant ces cours de botanique, je ne voyais pas le temps passer. » Durant son cursus de pharmacie, il affine ses connaissances des usages traditionnels des plantes. Ces savoirs se conjuguent à son amour de la nature, de l'horticulture. Diplôme en poche, il quitte Paris et passe quatre années à faire des remplacements. L'un d'entre eux l'amène à créer le rayon herboristerie d'une grande pharmacie bordelaise.
Herboristerie.
Cherchant à s'installer, mais n'ayant pas les moyens de racheter une officine, il recherche une création et aboutit à Lacapelle-Biron où, très vite, il crée son rayon herboristerie. « Travaillant avec des plantes fraîches que je renouvelais chaque année, cela m'obligeais à beaucoup jeter. Alors, j'ai eu l'idée de fournir des confrères. » Il démarre ainsi la fabrication de mélanges de plantes. Ayant toujours une idée d'avance, Alain Bruys envisage de conjuguer sa passion des plantes à celle de sa région d'adoption. « Je voulais cultiver des plantes médicinales sur place. J'ai acheté des plans à l'INRA et contacté des agriculteurs. La région s'y prête : sols variés, présence de fours à pruneaux et de séchoirs à tabac. »
Mais l'évolution des règles de la pharmacopée européenne exigent des contrôles de production très stricts et complexes qui l'obligent à renoncer. Il développe alors ses activités médicinales, proposant suspension de plantes fraîches, extraits fluides, puis gélules à base plantes ou d'extrait sec. Un marché qui fluctue au gré des déremboursements.
Préparations magistrales.
Peu à peu, il élargit sa gamme aux préparations magistrales chimiques, principalement des préparations pédiatriques. Il rejoint ainsi la trentaine de pharmaciens français réunis au sein de la Société des officinaux sous-traitants en préparations magistrales (SOTP). Il pousse ensuite vers les huiles essentielles. « L'aromathérapie et une médecine intéressante. Elle a une bonne puissance d'action, permet de limiter le recours aux antibiotiques et propose, par exemple, la seule action antivirale efficace contre la grippe aviaire. » Il diversifie ses préparations : suppositoires, pommades, ovules, ampoules, gommes… Chaque mois, 1800 préparations sont délivrées (via répartiteurs) à une clientèle de 700 pharmacies du sud-ouest (Limousin, Aquitaine, Charente…). Cette activité représente un tiers de son chiffre d'affaires.
Officine et laboratoire emploient 9 personnes : deux pharmaciens, 3 préparateurs, et des salariés en formation (BP, apprentis) : « La difficulté est de maîtriser son développement. En effet, notre service, c'est la rapidité de réponse aux prescriptions. Or, cela nécessite une adéquation entre la demande et le personnel disponible. » Pas facile de faire venir de la main d'œuvre à Lacapelle-Biron, aussi Alain Bruys a-t-il opté pour un recrutement de jeunes de la région qu'il forme dans son laboratoire.
Week-ends botaniques.
« Le métier est intellectuellement passionnant mais, à 59 ans, j'aimerais passer la main », avoue notre pharmacien qui cherche un repreneur. Mais il n'en a pas fini avec les projets et les passions. A commencer par sa commune de Lacapelle-Biron où il entend passer sa retraite et où il s'est déjà beaucoup investi, à la tête du syndicat d'initiative, des commerçants ou du musée Bernard Palissy. Ce dernier, situé dans le superbe hameau restauré de Saint-Avit, abrite la maison natale du céramiste et des œuvres de ses confrères contemporains.
Mais c'est aux plantes qu'Alain Bruys entend consacrer sa retraite pour s'adonner à la photographie botanique, créer son propre jardin botanique « où les plantes seraient présentées par parterres selon leur action », organiser des week-ends botaniques pour pharmaciens et préparateurs : « on pourrait mêler des randonnées de découverte des plantes et l'étude de leurs usages, y compris culinaires ». Formation et convivialité, voilà un programme qui, au cœur d'une vallée à la beauté saisissante, méritera le détour… comme disent les guides.
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